Ils ont dû profiter de l’ombre et de la nuit pour se glisser sans bruit aux yeux de l’ennemi
Anonymes discrets évitant toute gloire, ils ont tracé ici une page d’histoire
Vers les vallées d’Andorre, venant de Mounicou, cent fois par ces chemins, ils ont risqué le coup
Ils prenaient résolus, les sentiers de montagne s’aggripant aux rochers qui surplombent l’Espagne
Quand la lune voilée leur cachait la piste, leurs sens affutés s’habituaient très vite
Aux bruits, à l’odorat, ils se guidaient fort bien, là c’était le ruisseau, et plus haut les sapins
Au fond d’une cabane ou au creux d’un rocher, ils se cachaient le jour, évitant le danger
Alors, ils repartaient, trainant des juifs errants encordés aux vieillards et portant les enfants
Izards et sangliers étaient leur compagnons lorsqu’au soir couchant, ils traversaient les monts
La résistance ailée leur demandait soutien jamais ne refusant, sachant que c’était bien*Par le port de Bouet et par le port du Rat, fuyant tous les mauvais, on passa, on passa
Le pilote abattu, par les autres amenés, le patriote à mort qui était condamné
On passa l’être humain qui n’avait plus de route, tombé dans le cours de l’immense déroute
Aux Denjean, aux Delpy, à bien d’autres encore, tous passeurs inconnus vers le pays d’Andorre
Oh ! faites qu’aujourd’hui nul ne puisse oublier ceux-là qui dirent non !, refusant de plier
Il parait que le soir, le long des Pyrénées, lorsque souffle le vent de Méditerranée
L’on entend comme un chant plaintif et continu, la voix des innocents, vibrante et soutenue
Monter des profondeurs, des failles et des ravins dans un hymne à la paix, solennel et divin
Peuple libre à genoux! Dieu pour l’éternité, ils nous ont réappris le nom de LIBERTE.
(texte écrit par M. AZEZIAT, à la gloire de Mr DENJEAN, passeur à Mounicou, à partir de faits relatés parM. René RAYNAUD)